Il n’est jamais trop tôt pour dessiner son potager. Cela peut sembler un peu extrême de parler potager alors qu’il y a encore 3 pieds de neige dans votre cour, mais vous découvrirez dans cet article pourquoi maintenant est le moment idéal. Vous y trouverez également l’information nécessaire pour déterminer quel type de potager est idéal pour vous.
Aujourd’hui, la planche de culture de 75 cm (proposée entre autres par Jean-Martin Fortier #ref:99#) s’impose chez les maraîchers biologiques. C’est un modèle optimisé pour sa productivité et sa rentabilité qui a fait ses preuves. Mais tout le monde qui jardine n’a pas la rentabilité comme objectif premier. Cet article explique les différentes options avec leurs avantages et inconvénients, afin d’optimiser votre potager selon ce que vous voulez vivre.
Choisir un type de potager adapté à ses ressources et ses besoins est important pour rendre l’expérience estivale pleinement satisfaisante.
Pourquoi dessiner son potager maintenant?
Tisane et jardin met à votre disposition une application de dessin et planification de jardin. Vous pouvez l’utiliser librement. Il suffit de cliquer sur le bouton bleu pour y accéder.
Les différents types de potagers explorés dans cet article
tisane et jardin crée la liste de graines et de plantes à vous procurer selon votre plan de jardin et vous indique quand il est temps de commencer les activités
Une fois votre potager dessiné, vous trouverez dans les tâches d’implantation l’inventaire (quantité, espèces) de graines et de plantes à vous procurer pour réaliser vos plans de jardin. Une simple « checklist » adaptée aux appareils mobiles pour l’apporter en jardinerie ou suivre le progrès des emplettes sur internet.
Types de potagers
Cet article détaille quatre types de potagers et 3 sous-types pour le populaire potager en planches permanentes :
- Rang individuel
- Planche permanente
- Planche surélevée standard de 75 cm
- Potager en carré et planche surélevée élargie à 1,20 m
- Plate-bande gourmande – planche surélevée au contour libre
- Potager en bac surélevé
- Forêt nourricière
Ces types sont des archétypes. Bien sûr, vous pouvez vous amuser à jouer avec leurs caractéristiques pour faire des types hybrides. Inspirez-vous sans vous limiter au modèle.
1 – Type de potager en rang individuel séparé d’un sentier
Potager inspiré des pratiques motorisées, ce type de jardin est surtout optimisé pour la culture industrielle et motorisée. Pour un potager manuel, ses avantages se limitent à la rapidité de la mise en place initiale. Cet avantage est contrebalancé par un besoin accru du travail de la terre. Bref, c’est à mon avis le moins performant des potagers présentés dans cet article.
Inspiration
Aujourd’hui encore, on voit pas mal de ces potagers où chaque rang est séparé par un mini sentier… Je ne sais pas pourquoi on associe ce type de potager aux potagers d’antan. Pourtant, c’est plutôt le modèle utilisé par l’agriculture en grande surface, cultivée avec véhicule motorisé. Si vous avez l’intention de cultiver vos légumes « à l’huile de bras », ce n’est pas un modèle optimisé. On perd beaucoup trop d’espace en sentier, ce qui nous contraint à faire des sentiers si étroits que l’ergonomie et donc l’efficacité au jardin sont également affectées.
Si votre sol est léger et bien drainé (type sableux), avec ce type de jardin à rangs étroits, il vous sera difficile et contre-indiqué de faire des rangs surélevés. Si vous avez une terre lourde et compacte (de type glaiseux), ceux-ci seront probablement nécessaires pour améliorer le drainage, mais ils vous coûteront davantage d’espace et chaque pente entre le rang de culture et le sentier sera un milieu propice pour les plantes adventices.
Dans ce type de potager où la largeur du rang est déterminée par l’espèce cultivée, il faut habituellement travailler le sol chaque année pour le décompresser là où il y avait un sentier. Ce type de jardin exige donc un travail du sol récurant, ce qui n’est pas optimal pour les micro-organismes qui y travaillent (généralement de façon bénéfique pour la fertilité du potager).
Utiliser des toiles de géotextile prétroué pour faire des cultures sans plantes adventices
Utiliser des toiles de type géotextile avec des trous prédéfinis selon la culture est très utile. En plus de réduire le temps de désherbage, cette technique aide à faire des rangs bien droits à espacements égaux. Finalement, pour la rotation des cultures, il suffit de déplacer les toiles.
C’est une technique qui fonctionne bien dans des potagers dont la surface du sol est plane. Elle est également fréquemment utilisée pour les planches surélevées de grandeur standardisée.
2 – Type de potager en planche surélevée
La planche standard de 75 cm, le jardin en carré de 1,20 m et la plate-bande gourmande (aux formes libres) ont beaucoup de points en commun. Ce sont 3 variantes de la planche de culture permanente et surélevée. Ces planches permanentes de culture exigent un investissement initial plus grand que le potager en rang, pour les mettre en place. Il y a plusieurs techniques plus ou moins exigeantes en temps, comme celle des couches en lasagne ou simplement un bon double bêchage avec beaucoup de terreau à potager et de compost.
L’intérêt des planches permanentes est qu’elles réduisent le travail du sol et le compactage du sol (car on ne marche jamais sur une planche), ce qui favorise les micro-organismes bénéfiques; c’est donc un investissement qui a des bénéfices à moyen et long terme pour le jardinier. Comme la majorité des plantes potagères aiment un sol bien drainé, avoir une planche surélevée permet un meilleur drainage, mais dans le cas où la terre est plutôt sableuse, et si vous êtes dans des régions où l’eau se fait rare, on fait parfois des planches en dessous des sentiers pour aider à concentrer l’eau de pluie dans les planches.
La hauteur des planches dépend beaucoup de votre type de sol : plus le sol est léger et drainé, plus il vous sera difficile et contre-productif d’élever les planches (les planches auront alors peut-être 10 cm d’élévation). En contrepartie, plus votre sol est lourd et gorgé d’eau, plus vous lui donnerez de la hauteur (30 cm, parfois plus).
Avec ou sans murets
Plusieurs maraîchers vivent bien avec ces petites pentes sans muret pour retenir la terre… Cette solution est économique, mais alors il faudra parfois replacer la terre qui est tombée dans les sentiers. Pour les potagers urbains, on voit plus souvent des planches placées sur la largeur pour retenir la terre surélevée. Il y a bien des alternatives à la planche, telles que des briques, des roches, j’ai même vu parfois des pneus… L’idée est d’offrir un support qui délimite et retient la terre. Évidemment, construire ces petits murets est bien plus facile avec des planches rectangulaires que sur des plates-bandes décoratives aux formes variées.
Les maraîchers qui veulent un maximum de rendement à l’heure vont souvent cultiver les planches en monoculture, mais de plus en plus de jardiniers adoptent un modèle de compagnonnage de plantes pour les différents services que les plantes peuvent se rendre entre elles.
2a – La planche standard (généralement 75 cm de large)
La planche standard de 75 cm est le type de potager idéal si vous voulez optimiser le ratio rendement / temps.
Ce type de potager est probablement le plus utilisé par les maraîchers professionnels. L’archétype de ce modèle est le format à l’ergonomie optimisée proposé par Jean-Martin Fortier #ref:99# avec des planches cultivables de 75 cm de largeur et des sentiers de 45 cm de largeur. C’est un excellent compromis avec un usage efficace de l’espace de culture et une bonne ergonomie, ce qui permet une efficacité optimum lors des différents soins.
Avoir des planches à dimension prédéterminée augmente la réutilisation des équipements comme le tunnel, les couvertures, les bâches, etc., et permet aussi d’acheter de l’outillage idéalement dimensionné pour vos planches. Avec le succès du livre de Jean-Martin Fortier, ce modèle de planche à 75 cm semble s’imposer comme la norme chez les maraîchers.
Avoir des planches toutes rapprochées et identiques les unes aux autres fait très ordonné, mais personnellement je trouve que c’est un peu trop rectangulaire. Cela fait plus efficace que naturel.
2b – En carré ou en planche élargie à 1,20 m
Le potager en carré ou la planche élargie à 1,20 m est le potager optimisé en fonction de l’espace. C’est donc le potager idéal pour ceux qui recherchent l’autonomie alimentaire, mais sur une petite surface.
Essentiellement, le jardin en carré est un jardin à planche définie, aux dimensions de 1,20 m sur 1,20 m (ou 4 pi sur 4 pi).
Ergonomie
Ce sont les dimensions qui optimisent le rendement de la surface. Bien sûr, vous aurez un peu plus de mal à donner des soins aux plantes situées au milieu (qui seront presque deux fois plus loin que les plantes d’une surface de 75 cm), surtout si vous n’êtes pas très grand ou très grande, mais vous minimisez l’espace perdu au profit des sentiers. Naturellement, vous économisez encore plus d’espace de sentier si vous allongez vos planches de 1,20 m pour en faire un long rang plutôt qu’un carré.
Densité de culture
Comme le principe du potager en carré est d’avoir le plus de récoltes par mètre carré, ces cultures vont normalement utiliser une plus grande densité de plantation (en moyenne, une densité 20 à 40% supérieure). Planter de façon rapprochée réduit l’espace disponible pour les mauvaises herbes et produit généralement un plus gros volume. Vos plants ainsi entassés seront aussi plus résistants aux bourrasques de vent. En contrepartie, les fruits et légumes produits sont généralement plus petits et vous augmentez les chances que vos plantes soient victimes de maladies fongiques, faute d’une bonne aération. Finalement, les cueillettes vous coûteront beaucoup plus de temps, les plantes étant plus éloignées et plus enchevêtrées les unes aux autres.
Vous comprendrez qu’il est très facile d’adopter toute largeur intermédiaire entre la planche de 75 cm et celle de 1,20 m, qui pourrait représenter votre compromis idéal.
2c – La plate-bande gourmande
C’est le choix esthétique des jardiniers amateurs qui veulent intégrer leur potager à leur paysagement.
Ce variant est sans doute plus adapté au jardinier amateur. Il s’agit de la plate-bande surélevée au contour libre. C’est un modèle moins connu, décrit en détail par Albert Mondor dans son livre Plates-bandes gourmandes #ref:158# ). Ici, on fait un clair compromis de l’efficacité au profit de l’esthétisme. On peut utiliser le principe de la planche permanente autant pour des jardins de paysagement que pour des jardins mandala, ou même pour des jardins plus formels dits « à la française ». Évidemment, intégrer la courbe à nos planches représente des défis supplémentaires :
- Il faut bien travailler ses plans si on veut conserver une bonne ergonomie. Évitez les endroits plus larges que le 1,20 m du potager en carré. Pour utiliser personnellement ce modèle chez moi, je recommande le sentier de 45 cm seulement là où les courbes sont peu prononcées. Dans le cas contraire, il faut élargir si on veut pouvoir y promener une brouette;
- Les murets sont aussi plus difficiles à réaliser. J’ai réalisé les miens en utilisant des planches de pruche plantées à la verticale dans le sol.
- Ici, il est difficile d’installer des tunnels et les couvertures ne sont pas interchangeables d’une plate-bande à l’autre.
tisane et jardin permet de dessiner des surfaces de cultures avec des formes complexes en un tour de main
Avant l’arrivée de l’application tisane et jardin, on était limité aux formes rectangulaires par fichier Excel ou sur papier quadrillé et autres applications de jardin. Avec tisane et jardin, vous avez une totale liberté autant pour dessiner des formes rectangulaires, des ellipses, des lignes, mais aussi toutes sortes de polygones, des arcs de cercle et des courbes de Bézier.
Faire des plates-bandes mixtes est également un jeu d’enfant
Les algorithmes de tisane et jardin vous permettent de combiner plusieurs espèces sur une même surface et de décider si vous voulez les placer en carré ou en quinconce pour calculer le nombre de plants qui entrent dans la surface. C’est facile, rapide et très pratique.
Type de culture
Parce que l’efficacité est mise au 2e plan, la plate-bande gourmande se permet de mélanger vivaces et annuelles. Les vivaces comestibles, une fois installées, demandent moins de soins que les annuelles, par contre leur position permanente va gêner les opérations comme l’aération du sol qui est si bénéfique à certaines cultures (notamment les légumes racines).
Dans ce modèle, on maximise la variété et le compagnonnage pour créer des synergies bénéfiques et attrayantes visuellement. En contrepartie, pratiquer la rotation des cultures devient à la fois beaucoup plus difficile et moins pertinent. On se contente généralement de déplacer ses annuelles d’une année à l’autre et de prévenir la concentration de plantes de la même espèce sur une aire donnée.
Autre avantage à la dispersion des espèces et aux sentiers irréguliers : on est beaucoup moins sensible aux insectes et animaux nuisibles. À mon avis, les plates-bandes gourmandes sont une alternative encore trop méconnue. Si ce type de jardin vous intéresse, je vous recommande l’excellent livre d’Albert Mondor, dont j’ai écrit une critique de livre.
3 – Type de potager en bacs surélevés
C’est le potager des personnes qui veulent de bons résultats rapidement sans avoir peur de se faire mal au dos.
Ces potagers sont de plus en plus populaires chez les jardiniers urbains. C’est la version de luxe du jardinage! Idéale pour les personnes qui ont des problèmes de dos ou qui ont plus de difficulté à se pencher pour travailler la terre, c’est aussi la méthode qui demande l’investissement de mise en place le plus grand. Construire ou acheter ses bacs et la terre pour les remplir est donc plus coûteux, mais ce type de culture offre une ergonomie idéale.
Accessibilité réduite pour les nuisibles, mais aussi pour une partie des auxiliaires
Ces bacs protègent également de certains animaux comme les marmottes, qui n’arrivent pas à y grimper. Malheureusement, ils sont généralement aussi des environnements peu accueillants pour les précieux vers de terre. Vous remarquerez que même si vous ajoutez manuellement des vers de terre à vos bacs de jardin, ceux-ci ne font pas longue vie dans les bacs. C’est en partie parce que le climat y est moins tempéré, tant pour la température que pour l’hydrométrie. Les bacs surélevés sont des environnements fermés moins résilients que la culture en pleine terre, et demandent plus d’ajouts de compost ou d’engrais et de fréquents arrosages .
Densité de culture et grosseur des bacs
L’espace de culture en bac surélevé est habituellement dispendieux et limité. On le maximise donc généralement avec des plantations très denses, comme pour les jardins en carré. Normalement, plus le bac est grand et plus il sera tempéré, et donc facile de culture. Des bacs très petits (par exemple des jardinières) ne se prêtent pas à plusieurs cultures, mais la plupart des modèles que je vois sont des bacs de grand format (au moins 40 cm de profondeur) dans lesquels on arrive à faire pousser presque toutes les plantes potagères.
La culture en bac extérieur n’est pas optimale pour les plantes vivaces (en climat nordique). Ces plantes, qui sont rustiques lorsque plantées dans le sol, ne sont pas adaptées aux températures beaucoup plus froides qui sévissent dans les bacs l’hiver. Ironiquement, c’est au contraire une bonne idée de planter les vivaces peu rustiques dans des bacs, si vous avez la place pour les rentrer (à condition que ceux-ci soient mobiles) lors de la saison froide.
Bac sans fond
Finalement, une solution intermédiaire est le bac surélevé sans fond (donc en contact avec le sol), pour permettre les échanges d’eau et de micro-organismes. Pour l’eau, c’est certainement une bonne idée. Pour les micro-organismes, il faut comprendre que chaque type vit dans une strate bien définie de la terre. Je ne crois pas que ceux qui vivent à la surface de votre jardin pourront remonter le mètre de votre bac.
4 – La forêt nourricière
C’est le modèle idéal du jardinier contemplatif. Il est idéal pour celui qui a le temps et l’espace. Il demande des connaissances de permaculture.
Elle peut prendre plusieurs années avant d’être productive, mais elle est idéale pour produire de l’alimentation à moindre effort. Constituée d’arbres fruitiers, de petits fruits, de vivaces comestibles et d’annuelles qui se ressèment, on a bien peu de soin à donner à la forêt diversifiée et établie. On se contente majoritairement d’observer et on limite les soins au minimum ou on intervient surtout si l’équilibre est rompu. C’est la culture la plus écologique. On crée un environnement diversifié et on laisse la nature faire travailler son abondance naturelle. Évidemment, cela implique de partager les récoltes avec les autres habitants de la forêt; cela fait partie « du deal ».
Esthétique et connaissances requises
Côté esthétique, la forêt nous donne certainement moins de vues spectaculaires que la plate-bande gourmande. Cependant, j’ai remarqué que la plupart des plantes atteignent le maximum d’harmonie et de résilience lorsqu’on les laisse se développer sans trop intervenir. De plus, la forêt nourricière est grouillante de vie, ce qui ajoute beaucoup à sa beauté naturelle. La forêt nourricière demande la capacité à reconnaître les espèces comestibles. Elle appelle à la diversité et offre une très grande richesse nutritive. Attention: elle peut cependant être dangereuse, si l’on n’a pas les connaissances pour bien identifier les plantes. Elle exige une bonne connaissance de la permaculture et des cueillettes respectueuses pour maintenir sa productivité.
Voici donc un tour des avantages et inconvénients de chaque type de potager. J’espère que cette lecture vous aura inspiré, n’hésitez pas à utiliser les commentaires pour me dire quel type de potager est votre potager idéal, et pourquoi!