Le livre Notre ville permaculturelle est un petit manuel pratique et inspirant pour devenir une actrice socio-permaculturelle.
Soyons honnêtes. C’est avec beaucoup de scepticisme et parce que j’admire son autrice principale que je commençai la lecture d’un énième livre sur la permaculture. Pas que je n’aime pas la permaculture: je l’admire. Mais j’ai l’impression de toujours relire les mêmes principes et exemples (spirale de fines herbes, rebord de lac sinueux, meilleure utilisation de l’eau de pluie, etc.).
Mais moins de 10 pages plus tard, j’étais accro. Ce livre offre réellement une perspective nouvelle. Une permaculture sociale qui prend soin non seulement de l’environnement, mais également des communautés et acteurs de changements nécessaires pour aller au-delà du projet personnel. Bref, la table est mise pour une belle rencontre.
La permaculture appliquée à l’initiative sociale
11 autrices ont pris le thème de la permaculture, thème sur lequel elles ont à la fois l’expérience et les connaissances, pour l’explorer depuis la thématique de l’initiative sociale. Toujours les mêmes principes (on ne réinvente pas la permaculture), mais de toutes nouvelles applications et en prime, de réels outils pratiques pour passer de l’idéation à la réalisation de groupe.
« La permaculture est pour moi une inspiration, non un dogme »
Christelle Fournier
La permaculture est basée sur 3 principes :
- Prendre soin de la terre
- Prendre soin de l’humain
- Partager équitablement – levier de la permaculture urbaine et citoyenne
Pourtant, quand on ouvre un livre de permaculture, généralement on passe la majorité du contenu à parler de la terre. Voir sa polyvalence dans les sphères sociales renforce ma compréhension de celles-ci. Mais surtout, cela apporte des perspectives créatrices nouvelles.
Le concept: un livre écrit en utilisant l’intelligence collective
Le fil conducteur a été construit par Christelle Fournier. Mais elle a fait équipe avec 10 autres autrices, pour venir enrichir le contenu de leurs expériences propres et de leur expertise. Ce qui fait que le texte, loin d’être théorique, est très concret, parfois personnel mais en gardant une applicabilité universelle.
Je copie ici la critique de Fanny Lignères qui, je trouve, est fort appropriée :
»Je viens de terminer l’ouvrage collectif et ça fait échos à mon univers et mon esprit de pensée tellement longtemps à contresens du bien-pensant d’il n’y a pas si longtemps. Enfin ! merci pour cette lecture dans ce monde dont l’actualité porte au pessimisme, de toutes ces belles énergies saines, réalistes, bienveillantes et opérationnelles, car elles nourrissent mon état d’esprit optimiste et me confortent dans mes convictions de la voie que j’ai choisie pour faire société. Encore un grand bravo. »
Fanny Lignères – Développeure économique chez ACCAPDIS
Les pistes d’exploration offertes dans le livre Notre Ville Permaculturelle
Dans cette lecture, j’ai eu le plaisir de retrouver plusieurs repères que j’avais connus dans des contextes non permaculturels, dont : Communication Non Violente (CNV), de Bono, low tech, OBREDIM (Observation, Bordures – Limites, Ressources, Évaluation, Design , Implantation, Maintenance), SMART – qui est devenu SMARTEF en y ajoutant l’écologie et le fun… pourquoi pas. Après tout, dans le contexte, c’est très pertinent.
Zone de compétences
J’ai eu un déclic en lisant sur les 3 zones de compétences. J’ai réalisé à quel point en ce moment, puisque nous sommes tous des travailleurs bénévoles pour notre plateforme tisane et jardin, nous avons une opportunité unique d’expérimenter. De mieux comprendre pour mieux prendre soin de notre zone d’enthousiasme. Parce que si on veut continuer à avoir du fun à la bâtir dans 10 ans, il faut prendre soin de l’enthousiasme des bâtisseurs. Et ce, même aujourd’hui, pendant qu’on surfe encore sur la lune de miel des 4 premières années.
Créer de l’intelligence collective
J’ai aussi particulièrement apprécié la section où l’on parle d’intelligence collective. Comment aller au-delà de la démocratie, du compromis pour que nos idées s’influencent et fusionnent jusqu’à avoir une créativité et une stratégie qui, même en partie, n’étaient pas présentes chez aucun de nous. Bon, ici aussi il faudra lire le livre pour avoir les réponses. Ici, je n’ai le temps que de vous parler des sujets sur lesquels le livre m’a outillée pour mes projets.
Les hubs, ces forces qui pourraient peser lourd
La section qui m’a quant à moi le plus ébranlée est celle sur les hubs. Un hub est défini comme « une personne qui capitalise une ressource qui est significative pour le groupe et les projets qu’il soutient ». Pour mieux comprendre les hubs, voici quelques exemples : le leader naturel; un spécialiste dont les connaissances ou le savoir-faire sont indispensables au succès du projet; une personne qui capitalise un savoir-être; celle qui a la charge du bien-être des participants…
L’idée ici n’est pas de culpabiliser ces hubs. La plupart du temps, ceux-ci se sont formés par la dynamique du groupe et aussi parce qu’on a des participants talentueux et généreux. Mais parfois, ces forces peuvent devenir un poids pour les hubs eux-mêmes et un risque pour les projets. L’idée est donc de les nommer et d’être sensible aux dynamiques qu’ils créent. Et de regarder comment on peut mieux répartir la charge qui en découle. Dans un monde qui encense les héros et tend à décupler leurs ressources et leurs responsabilités, c’est fou comme ce chapitre m’a fait du bien. Retournons à notre humanité et redonnons confiance à l’intelligence collective, pour créer des projets plus humains et plus pérennes.
Finalement, dans ce projet, on peut dire que « les bottines ont suivi les babines », car le livre numérique est vendu sous le concept de tarification équitable. Ceci favorise un accès universel, tout en prenant soin de considérer le travail et l’investissement financier du collectif.
Conclusion
Bref, à mon avis ce livre sert bien son intention qui était :
« Ouvrir la réflexion aux écocitoyen·nes qui se sentent interpellé·es afin de favoriser le maillage fertile entre les projets soutenant la transition socioécologique et inventer ensemble nos villes résilientes dont l’éthique s’inspire des trois principes de la permaculture. »
Chapeau, et merci pour ce regard écoféminin, plein d’empathie, d’humilité, mais néanmoins audacieux et créatif.